Dans la tête d’un skipper : le Vendée Globe, une source d'inspiration pour dirigeants et managers
✍🏼 Episode 2 - Prise de risque ou pas ?
Voici bientôt un mois que le Vendée Globe est parti et il est déjà source de très nombreux enseignements. Dans nos thèmes de prédilection, un sujet revient régulièrement dans les grandes courses au large : la prise de risque.
Si vous avez suivi, même de loin, le Vendée Globe, vous n’avez pas pu rater l’énorme dépression à laquelle les skippers doivent faire face.
Ainsi, cette première grosse dépression du grand sud va nous permettre d’illustrer à la perfection ce sujet de la prise de risque.
Ces derniers jours, le groupe de tête de ce Vendée globe fait face à la première dépression du grand sud. Si nous devrons attendre qu’ils soient en approche du Cap Leeuwin pour faire le bilan, il est déjà extrêmement interessant d’analyser comment les six leaders ont négocié ce premier gros coup de vent.
💡Alors, c’est quoi la décision en course au large ?
Christopher PRATT a modélisé la prise du décision du coureur au large en solitaire. Le schéma ci-dessous reprend les principaux éléments.
Evidemment, il est difficile de disposer de tous les éléments constitutifs de la décision de chaque marin.
Néanmoins, nous avons pu constater trois familles de décision :
1 - Beyou / Lunven : les early décideurs
Jérémie Beyou et Nicolas Lunven font partie de ceux qui très tôt ont pris la décision de se décaler dans le nord pour ne pas prendre le risque de se retrouver dans le cœur de ce monstre austral !
Jérémie a une énorme expérience du grand sud. Il ne sait que trop bien qu’il y est important de préserver son bateau qui dispose de fantastiques qualités pour la remontée de l’Atlantique.
Parce que PRB sort d’une série de 4 abandons sur la course et que pour lui, c’est une grande première, Nicolas lui a pour objectif majeur de finir, ce qui induit évidemment une plus grande prudence.
2 - Richomme / Ruyant : les équilibristes
Thomas Ruyant et Yoann Richomme sont de ceux qui ont longtemps essayer de se garder un maximum d’opportunités ouvertes.
Yoann, même s’il a mené la course et est sans doute l’un des grands favoris, c’est son premier Vendée Globe et il veut finir coûte que coûte.
Thomas, quant à lui, souhaite sortir du sud avec un bateau à son plein potentiel pour ne pas vivre une remontée de l’Atlantique similaire à celle de 2020 lors de laquelle amputé d’un foil, il avait beaucoup souffert.
Leurs deux bateaux ont montré certaines fragilités structurelles et c’est un élément qu’ils ont nécessairement en tête.
3 - Simon / Dalin : les audacieux
Le dernier groupe est constitué de Charlie Davin et Sébastien Simon. Ils ont eux décidé de prendre le risque de rester sur la route directe au risque de se retrouver coincé entre la zone des glaces et les vents violents de nord-est.
Charlie est là pour gagner. Il a déjà fini un Vendée Globe en passant la ligne en tête. Il est serein sur la préparation de son bateau et prêt à prendre les risques qu’il faut pour remporter la course quitte à la perdre.
C’est en revanche plus étonnant de trouver dans ce groupe Sébastien qui fait une course admirable depuis le départ. À mon sens, il a du beaucoup hésité et il n’était pas forcément très serein sur cette décision mais le temps avançant et la proximité de Charlie aidant, elle s’est trouvée être sinon la meilleure, au mieux la moins pire.
Prise de risque et bonne décision ?
En résumé, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise décision en tant que tel. L’important est de ne pas juger la décision une fois son impact connu, mais bien au moment où elle est effectivement prise. Il est toujours facile de refaire le match après ! Il est souvent aussi tentant de justifier a posteriori des décisions en racontant une belle histoire.
Il convient également de noter l’importance de la situation météorologique dans les différentes décisions analysées. En effet, chaque skipper était confronté à ses propres contraintes météo en raison de son positionnement au moment de décider. Il est évident que leur placement a eu une influence directe sur leur choix.
Les décisions s’avèrent ici être un révélateur très pertinent de la personnalité des marins, mais aussi de leur état d’esprit au temps T, probablement de l’état de leur monture et enfin de la manière dont ils se projettent dans la suite de la course.
Cet exemple nous montre bien comment l’évaluation des risques d’une situation est subjective. Elle doit s’analyser dans une approche macro prenant en compte les différents éléments relatifs à la prise de décision.
👉 Et vous, en tant que leader, c’est quoi votre rapport au risque ?